ESSAI

de CLE de DETERMINATION MACROSCOPIQUE
et de SYNTHESE
du genre LACTARIUS


Texte de Marcel LECOMTE
La rédaction de cet essai a été entreprise le 13 mars 2002

1. PREAMBULE

        Cette modeste contribution ne présente aucune prétention d’innovation en la matière, d’autant plus qu’elle traite d’un genre qui est qualifié de « relativement facile » par les mycologues confirmés. Cependant, la dispersion des renseignements ainsi que la sortie en 1998 d’une nouvelle monographie rédigée en anglais (Fungi of Northern Europe, Vol. 2) et d’une seconde en 1999 rédigée en italien et en anglais (« Lactarius Pers. » in Fungi Europaei, Vol. 7) et actualisant le sujet, nous ont amené à effectuer un important travail de tri et de compilation au sein d’un groupe que nous trouvons très intéressant. Au cours de nos investigations, nous avons répertorié plus de 160 taxons et quelques dizaines de formes et variétés, qu’il nous semble intéressant de regrouper pour la simple facilité de consultation. Nous y ajouterons une série d’expérimentations personnelles qui seront complétées d’ année en année et dont les limites seront posées par le matériel frais dont nous disposerons.

        Après quelques mois de « fouilles en profondeur », nous avons acquis la certitude que la notion de « facile » est très aléatoire. Bien évidemment, nous n’en sommes pas à la complexité des Cortinaires, Inocybes et autres Russules, mais la lecture de la dernière monographie du genre Lactarius, qui compte 845 pages, nous a amené à revoir cette notion de facilité.

        Lors des séances de détermination auxquelles nous participons, nous éprouvons parfois également le sentiment que certaines récoltes demandent à être plus fouillées en profondeur afin d’éviter des confusions entre espèces très voisines (ce qui n’est possible qu’en disposant, à notre avis d’un maximum d’informations regroupées et de tests discriminatoires très « pointus »…).

        C’est en écoutant une conférence de Paul PIROT que nous avons découvert cette attirance personnelle… Nous le citons : « « … les Lactaires m’intéressent particulièrement parce que c’est un genre qui se prête spécialement bien à une détermination macroscopique et sur le terrain ; les observations écologiques sont capitales au vu de leur association étroite avec les arbres et parce qu’un évident caractère sensuel préside à cette détermination… il paraît donc possible d’arriver à maîtriser plus ou moins, au bout d’une vie, un genre moins décourageant que celui des Cortinaires ! C’est pourquoi il fait mon affaire ! » »

        Nous allons tenter, durant les années à venir, d’établir une table de réactions chimiques la plus complète possible, avec l’aide de quelques amis du Cercle de Mycologie de Namur, et sur du matériel frais (qu’il n’est pas simple de se procurer pour des espèces plus rares…). Peut-être en sortira-t-il quelques renseignements qui apporteront une brique de plus à l’édifice de la Mycologie moderne. Et, quoi qu’il en soit, il nous restera au bout de ce travail, l’immense plaisir généré par une passion partagée et par l’étude, qui donnent un réel sens à une vie …

        Nous remercions tout particulièrement MM. Jean-Pierre LEGROS, Pol PIROT & Jules WILMET qui nous ont fait l’honneur de nous relire, et de nous conseiller, ainsi que Mme Maria Teresa BASSO et Mr. Régis COURTECUISSE qui nous ont aidé à résoudre des problèmes de vocabulaire ou de taxonomie, et à éclaircir des situations de confusion voire de doute ; nos remerciements vont également à Mmes Françoise DRAYE & Liliane PETRE, MM. Jacques ADAM, Eddy CLAUDE, Jacques DE VOS, Christian DOR, Philippe DUFOUR, Philippe FRANCOIS, Emile GERARD, et tous les autres, qui nous ont fourni récoltes et spécimens qui sont conservés en herbier et qui ont permis toute une série de tests chimiques personnels.


2. AVERTISSEMENT AU LECTEUR

        La classification utilisée dans cet essai est basée sur le système traditionnel de Hesler & Smith (1979) et de Bon (1983) ; c’est celle qui est employée par Marcel Bon, Régis Courtecuisse, André Marchand et Henri Romagnesi dans leurs ouvrages respectifs que la plupart d’entre nous utilisent actuellement pour la détermination. Nous avons regroupé tous les taxons, variétés et formes cités, mentionnés ou explicités par ces auteurs.

        Cette classification vient d’être bouleversée de manière radicale par deux publications importantes, qui remanient de fond en comble la répartition des sous-genres, notamment. Cela nous a posé d’ailleurs un problème de choix, car, si nous ne souhaitons pas stagner dans le traditionnalisme, nous ne tenons pas à verser dans un avant-gardisme excluant bon nombre de passionnés de mycologie qui n’auront pas tout de suite le temps ou les moyens de s’informer. Il va nous falloir du temps pour nous adapter à des modifications nomenclaturales et systématiques profondes et l’acquisition des nouveaux ouvrages ne pourra pas se faire du jour au lendemain… Aussi, notre choix de base permettra, je pense, de ne pas désorienter complètement les amateurs de lactaires tout en leur permettant de s’adapter petit à petit, grâce aux compléments d’information fournis en parallèle. Nous avons donc choisi d’inclure dans mon travail les nouvelles espèces décrites dans les deux monographies mentionnées ci-dessous, ainsi que d’indiquer les nouveaux taxons qui vont rendre certaines espèces au nom usuel, invalides par synonymie. Dans ce cas précis, le nouveau taxon prioritaire sera indiqué en caractères gras et placé entre parenthèses, juste à côté de son synonyme, dans les listes de référence.

        La première révision est proposée par Heilmann-Clausen, Verbeken & Vesterholt dans « The Genus Lactarius », 1998, 287 pages. Nous ne sommes pas qualifié pour porter un jugement, mais il nous semble qu’elle va vers la simplification, par synonymie. Elle est axée sur une logique basée essentiellement sur la microscopie, et traite surtout des espèces nordiques à boréales, à l’exclusion des espèces méditerranéennes. Nous vous la livrons pour comparaison dans les pages suivantes.
        La seconde est l’œuvre de Maria Teresa Basso. Dans un ouvrage monumental, « Lactarius Pers. », 1999, 845 pages, elle fait le point sur toutes les espèces européennes. Les clés de détermination sont basées sur les caractères macroscopiques essentiellement. L’auteur ne fait appel à la microscopie que dans les cas où elle est indispensable pour différencier deux espèces.Nous vous livrons également sa classification, ainsi que les espèces qu’elle reprend.
        Nous avons le sentiment, après un examen minutieux de ces deux « monuments », qu’il sont appelés à constituer les ouvrages de référence par excellence pour les lactaires, pour de longues années.

        Nous avons opté, dans ce travail, pour une démarche essentiellement macroscopique, afin de favoriser la détermination directe sur le terrain, mais il sera parfois nécessaire (indispensable pour certains taxons) de faire appel à des références microscopiques pour arriver à déterminer un champignon avec toute la rigueur et la précision nécessaires.



2.1. RENSEIGNEMENTS BIBLIOGRAPHIQUES :

        Les renseignements fournis dans les tableaux de synthèse qui figurent en dessous des clés de détermination des sections et sous-sections (page ou numéro), permettent de trouver une description de l’espèce, des remarques précises et (ou) une photo dans les ouvrages indiqués ci-dessous. Lorsqu’ un taxon est indiqué en caractères gras, cela signifie qu’il est repris dans la dernière classification, de Madame Basso (1999).


2.2. AUTEURS :

FMDS fait référence au Bulletin de la Fédération Mycologique Dauphiné -Savoie.
FMS fait référence au Bulletin de la Société Mycologique de France.

HCVV fait référence à un numéro de page dans le livre intitulé « The Genus LACTARIUS », in Fungi of Northern Europe, Vol. 2, de Jacob HEILMANN-CLAUSEN, Annemieke VERBEKEN & Jan VESTERHOLT. Ces auteurs ont effectué un remaniement important de la classification des lactaires, qui entraîne un certain nombre de modifications. Les espèces concernées et synonymisées seront marquées par l’indicateur suivant : (##).
K.& R. fait référence à l’ouvrage de KUHNER et ROMAGNESI « Flore Analytique des Champignons Supérieurs ». Par exemple, la référence suivante « K. & R. p. 342, (15) », signifie qu’il faut consulter la note 15, de la page 342.
MB fait référence à un numéro de page dans le livre de Marcel BON (« Champignons d’Europe occidentale », chez ARTHAUD).
Mcd fait référence à un numéro d’ordre (de 501 à 583) dans le livre de André MARCHAND (Tome 6 de « Champignons du Nord et du Midi ») ; si une page est mentionnée, elle fait référence à ce tome 6, mais il n’y a pas de photo de l’espèce ; certaines espèces comestibles sont également reprises dans les tomes 1 et 2.
MTB fait référence à un numéro de page dans le livre intitulé « LACTARIUS Pers. », in Fungi Europaei, Vol. 7, de Maria Teresa BASSO. Cet auteur a également effectué un remaniement important de la classification des lactaires, qui entraîne un certain nombre de modifications. Les espèces concernées et synonymisées seront marquées par l’indicateur suivant : (µµ).
RC fait référence à un numéro d’ordre dans le livre de Régis COURTECUISSE & Bernard DUHEM (« Guide des Champignons de France et d’Europe », chez Delachaux & Niestlé, ou chez Eclectis) ; si le nombre est précédé de « p. », l’espèce est seulement mentionnée à la page de la clé de détermination générale.
Un astérisque (*) placé dans une table de détermination ou dans un tableau de synthèse des espèces d’une section ou d’une sous-section, invite à consulter les remarques qui sont placées juste en-dessous du tableau de synthèse, et qui fournissent un complément d’information.


2.3. DES PRECISIONS DE TERMINOLOGIE :

 « auct. » pour « auctorum », désigne l’auteur

 « comb. nov. » signifie « combination nova », c'est-à-dire « nouvelle combinaison », par exemple « genre + espèce » ; une combinaison nouvelle peut aussi s’appliquer à un rang différent (par exemple au rang variétal) ; cela s’applique donc quand on change le rang ou le statut (niveau hiérarchique) –ou les deux-, d’un taxon donné.
 « emend. » pour « emendavit » signifie « modifié par… » ; cette expression s’applique à un changement d’interprétation, donc à une modification plutôt subjective, et non à une véritable erreur commise par quelqu’un d’autre.
 « nom. conf. » pour « nomen confusum », signifie « nom pouvant prêter à confusion ».
 « nom. dub. » pour « nomen dubium », signifie « nom douteux ».
 « nom. nud. » pour « nomen nudum » ; on appelle nomen nudum, tout nom publié non accompagné d’un texte acceptable comme diagnose ou d’un élément équivalent (figure montrant des détails aidant à l’identification). Cette notion remonte à la seconde version du Code de Nomenclature (Vienne, 1905) où elle apparaît explicitement dans un article (p. 26, dans l’énoncé de l’ Art. 38). Elle en disparaît très tôt, tout en continuant à être utilisée par les spécialistes jusqu’à nos jours. Un nom publié accompagné d’une diagnose NON latine à partir du 01.01.1935 n’est pas valide. Un tel nom N’est PAS un nomen nudum. De même, un nom publié accompagné seulement d’une « figure montrant des détails aidant à l’identification » N’est PAS un nomen nudum. Il est valide s’il a été publié avant le 01.01.1908.
La recommandation 50B du Code de Nomenclature précise : « en citant un nomen nudum, on devrait indiquer son statut en ajoutant « nomen nudum ou nom. nud. ». Exemple : « Carex bebbii » (Olney, Car. Bor.-Am. 2 :12. 1871), publié sans diagnose ni description, devrait être cité comme Carex bebbii Olney, nom. nud.
Certains auteurs utilisent parfois l’expression « nomen subnudum », mais nous ne parvenons pas à en trouver la définition.
 « nov. sp. » pour « nova species » signifie « nouvelle espèce ».
 « s.l. » pour « sensu lato » signifie « au sens large ».
 « s. str. » pour « sensu stricto » signifie « au sens strict, limité, restreint ».
 « stat. nov. » signifie « status novus », c'est-à-dire « nouveau statut ».
 « ad int. » signifie « ad interim », c'est-à-dire « en attente de publication ».

Pour les gens passionnés de nomenclature, il est possible de consulter l’entièreté de l'ancien code (celui de Tokyo) « on line » sur http://wwwcjb.unige.ch/cjb/code/sommaire.html ; le nouveau code de Saint-Louis (1999) est accessible sur http://www.bgbm.org/iapt/nomenclature/code/SaintLouis/0000St.Luistitle.htm .


2.4. PAYS :

AN pour un champignon existant Amérique du Nord
B pour un champignon existant en Belgique (*)
CC pour un champignon « courant » en Belgique (c'est-à-dire qu’on ne lui confère pas l’étiquette de « rare »)
EC pour l’Europe centrale
F pour une espèce française, de plaine
M pour une espèce méridionale à méditerranéenne
N pour une espèce nordique (boréale)
ZA pour la zone alpine française
ZSA pour la zone subalpine ou la moyenne montagne

(*) : les espèces qui sont déclarées « existant en Belgique » ont été vérifiées dans la liste de l’herbier de Belgique (« Russulales Fungi in Belgium Herbarium »), au Jardin Botanique National de Meise… (possibilité de le consulter sur Internet http://www.br.fgov.be liste arrêtée au 20/10/1999… Des remarques à propos de spécimens qui y figurent : Lactarius necator, plumbeus & turpis sont tous synonymisés maintenant sous turpis (Weinmann) Fries ; hysginus s’appelle maintenant curtus Britz. ; y est mentionné également camphoratus var. serifluus qui est synonymisé maintenant avec serifluus (De Cand. : Fr.) Fr.
Elles sont également reprises et confirmées dans la liste de HCVV : « Data on geographical distribution », pp. 270 à 273, (Fraiture et al. 1995, Verbeken et al. 1995, 1996, Verbeken & Walleyn 1998, Walleyn et al. 1998, own studies).